28/02/2009

Entrer dans l'histoire de l'Afrique

1er mars 2009

Au Niger. Extrait du film " La Captive du désert ". RAYMOND DEPARDON / MAGNUM PHOTOS

L'historien britannique John Iliffe explore le continent, de la préhistoire aux ravages du sida








En soutenant en juillet 2007 à Dakar que " l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire ", Nicolas Sarkozy a réveillé une profonde blessure héritée de la colonisation. Ainsi, seule l'intrusion des Européens sur le continent noir l'aurait précipité dans l'aventure humaine. L'histoire de l'Afrique aurait commencé avec son dépeçage et sa mise en valeur par les Blancs, au XIXe siècle...

Les lecteurs de la somme passionnante de l'historien anglais John Iliffe, publiée pour la première fois en 1995, constateront qu'il n'en est rien. La colonisation, largement décryptée, n'y apparaît que comme un épisode dramatique de l'histoire longue d'un continent " immensément vieux ".

Depuis les australopithèques jusqu'aux malades actuels du sida, l'auteur défend avec passion " une histoire exceptionnelle des populations, qui lie en une histoire unique les tout premiers êtres humains à leurs descendants actuels ".

Une conviction traverse l'exceptionnelle épopée humaine à laquelle il nous convie : la démographie est le fil rouge de l'histoire africaine. Depuis la nuit des temps, les Africains sont " ces pionniers qui ont colonisé une région particulièrement hostile au nom de toute la race humaine ". L'immensité du territoire, le nombre des calamités qui s'y manifestent ont modelé l'organisation des sociétés en fonction d'impératifs intangibles : " Peupler et maîtriser l'environnement. " En découle l'obsession de la reproduction, avec ses corollaires : les cultes de la virilité et de la fécondité, la polygamie.

CONTINENT SOUS-PEUPLÉ

Car, jusqu'à la colonisation européenne, l'Afrique est restée un continent largement sous-peuplé. John Iliffe voit dans cette réalité, qui peut surprendre aujourd'hui, le principal obstacle à l'émergence d'Etats et au progrès économique. En même temps, il décrit avec une érudition époustouflante, appuyée par un pragmatisme très britannique, la première colonisation du continent : celle entreprise par ses propres habitants.

Loin d'être inertes, les " pionniers " africains n'ont cessé de lutter contre leur extraordinaire isolement en développant des royaumes prospères et en commerçant très tôt avec l'Europe et l'Asie.

La transformation d'un esclavagisme interne, séculaire, en traite atlantique aux dimensions industrielles allait alourdir encore les handicaps du continent. Le paroxysme a été atteint au XVIIIe siècle, durant lequel 6 millions d'esclaves furent exportés.

" Féroce ironie ", un continent sous-peuplé exportait ses hommes en échange de marchandises, avec la complicité agissante et pour le plus grand bénéfice de puissants africains. Sans expliquer tous les maux actuels du continent par la saignée de la traite négrière, John Iliffe souligne qu'elle a eu pour conséquence d'interrompre la croissance de la population d'Afrique de l'Ouest, d'accentuer le retard technologique et d'encourager la brutalité. Ce fut " un désastre démographique, mais pas une catastrophe : les Africains survécurent ", résume l'auteur qui, de façon quelque peu ambiguë, considère la souffrance comme " un aspect central de l'expérience africaine ".

De fait les tragédies ne devaient pas manquer par la suite, façonnant une capacité de résistance au malheur qui, aujourd'hui encore, subjugue l'Occidental. L'" invasion coloniale ", dont les ressorts sont subtilement analysés, accumula les effets dévastateurs. Aux ravages de la conquête militaire s'ajoutèrent les colères de la nature. La sécheresse des années 1880-1920 provoqua famines, maladies et violences. La population stagna, voire régressa dans certaines parties du continent.

PARADOXE DÉMOGRAPHIQUE

" Traumatisante mais brève ", la colonisation n'a pas entièrement balayé les traditions et structures africaines, estime Iliffe qui trouve là un autre exemple de l'étonnante " résistance africaine ". Mais les Européens n'ont pas seulement semé l'exploitation et la violence ; ils ont introduit leur modernité économique, leur éducation et aussi leur médecine.

Le spectaculaire rebond démographique enregistré depuis 1950 en serait la conséquence. La population de l'Afrique est passée de 200 millions en 1950 à 600 millions en 1990. C'est évidemment à ce point que se noue le paradoxe démographique soulevé par cet ouvrage. Si un sous-peuplement millénaire a pu expliquer le retard du continent, le décollage brutal de sa population n'a manifestement pas permis d'inverser la tendance.

Car d'autres mécanismes, de nature économique, sont à l'oeuvre. John Iliffe analyse la destruction dans les années 1980, sous la pression du FMI et de la Banque mondiale, des structures étatiques, notamment sanitaires, qui avaient garanti un minimum de paix sociale. Cette stratégie, s'ajoutant à l'instabilité née de la fin de la guerre froide, a produit deux décennies de déchirements violents dont le continent sort à peine. La prochaine édition de ce livre de référence comportera sans doute un chapitre supplémentaire analysant la manière dont les Africains auront manifesté leur éternelle résistance à la nouvelle épreuve en cours : la crise économique mondiale.

Philippe Bernard

Les Africains Histoire d'un continent de John Iliffe

Flammarion, " Champs Histoire ", 704 p., 12 ¤.

© Le Monde

27/02/2009

Nous sommes devenus les gestionnaires de nos propres jouissances

28 février 2009

Le capitalisme n'exige plus de se serrer la ceinture, mais de vivre à crédit

Il aura fallu un véritable tsunami financier pour qu'enfin on le comprenne : le capitalisme crée davantage de problèmes qu'il n'en résout. A l'instar des nombres naturels du théorème de Gödel, le capitalisme est un système qui ne peut être à la fois cohérent et complet. S'il reste cohérent avec ses principes, il se heurte à des problèmes insolubles ; s'il essaie de les résoudre, il doit renier ses propres fondements.

Bien avant que Kurt Gödel ne formule son célèbre théorème, Rosa Luxemburg avait publié une étude sur l'accumulation du capital où elle exposait comment la survie du capitalisme dépend d'économies non-capitalistes. La logique capitaliste n'est viable qu'à condition de s'appliquer toujours à de nouvelles " terres vierges " ; mais en les exploitant, elle entame leur virginité précapitaliste et épuise par là même les ressources nécessaires à sa perpétuation. C'est le serpent qui se mord la queue : un vrai festin, jusqu'à ce que la nourriture finisse par manquer et qu'il ne reste plus personne pour la manger...

Zygmunt Bauman

Professeur émérite de sociologie à l'université de Leeds,

auteur de " S'acheter une vie "

(éd. Jacqueline Chambon, 2008)

Traduit de l'anglais

par Myriam Dennehy

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La crise économique, un test pour la croissance africaine


Idées et Débats
Vendredi 27 février 2009

LE POINT DE VUE DE DANIEL COHEN

La crise du « subprime » s'est transformée en une crise économique majeure. Selon les prévisions du Fonds monétaire internationale, la croissance des pays riches sera négative en 2009, tant en Europe qu'aux Etats-Unis. L'ensemble des pays émergents devrait également connaître une décélération, passant d'une croissance proche de 8 % dans les années précédant la crise, à 5 % en 2009.

Le FMI est prudemment optimiste pour l'Afrique subsaharienne, notant que le continent est peu intégré aux circuits financiers internationaux, et qu'il dépend surtout de l'aide internationale pour son financement. D'un autre côté, l'Afrique sera fortement affectée par la détérioration du prix des matières premières. Au total, selon les dernières prévisions du Fonds, les perspectives de croissance pourraient être de 4,7 % au cours de 2009, contre 6 % avant la crise, soit une décélération moindre que dans les autres régions.

Si les prévisions du FMI restent sans doute teintées d'un trop grand optimisme, l'idée générale qui les sous-tend est juste. L'Afrique n'est plus le parent pauvre de la croissance mondiale. Depuis le milieu des années 1990, les perspectives de croissance semblent avoir été ressuscitées sur le continent. La décennie 1995-2005 marque une rupture très nette. Au cours de la décennie précédente, la croissance du revenu par habitant avait été négative, - 0,2 % en moyenne. Elle s'élève à 1,9 % au cours de la décennie 1995-2005. Ce sont des chiffres qui restent faibles en comparaison des moyennes observées en Asie, mais qui marquent une rupture nette et indiscutable pour le continent lui-même. A l'échelle des pays, d'ailleurs, bon nombre réussissent des performances dignes des meilleurs niveaux asiatiques.

Pour lire lasuite de l'article, télécharger la version pdf en cliquant ici

22/02/2009

Voyage au bout du charbon

Zola, c'était le paradis !!!


Voyage au bout du charbon
LEMONDE.FR | 17.11.08

© Le Monde.fr

20/02/2009

Coopération entre la commune d’AUBIERE et la commune de ROLLO au BURKINA FASO - Réunion publique le 5 mars 2009

Une première réunion publique, le 26 novembre dernier, a réuni près d’une cinquantaine d’aubièrois, parmi lesquels de nombreux élus, des représentants du monde de l’éducation, de la culture, des associations et des étudiants, pour prendre part aux premières actions, dans le cadre de la solidarité Nord Sud, que la municipalité d’AUBIERE a initiées avec la commune de ROLLO au Burkina Faso.
Pour donner suite à cette initiative et participer à la conception de l’exposition photos sur ROLLO programmée pour la semaine du 10 au 17 mai 2009, au musée de la vigne et du vin[1], vous êtes invités à une :
Réunion publique qui aura lieu le Jeudi 5 mars à 20H00 au Musée de la Vigne et du Vin.

L’ordre du jour sera le suivant :


• Projection du reportage de 7 mn de France 3 Rhône – Alpes – Auvergne sur le jumelage entre AUBIERE et ROLLO.
• Compte rendu des rencontres de Jacques FONTAINE, conseiller municipal d’AUBIERE, à l’occasion d’une mission réalisée dans le cadre d’une ONG, avec le Maire de ROLLO dans sa commune, au mois de décembre 2008.
• Présentation du projet de l’exposition photo sur ROLLO et débat au sujet de sa conception.
• Organisation de l’atelier de conception de l’exposition et des permanences pour la durée de son ouverture au musée.
Le conseil municipal du 26 février 2009 statuera sur la mise en place d’une commission extra municipale de solidarité Nord Sud, ouverte aux citoyens d’AUBIERE désirant apporter leur contribution à cette relation avec la commune de ROLLO. Des informations seront données sur les modalités pratiques d’installation de cette commission.

[1] Voir Les Echos d’AUBIERE – N° 89 de février 2009
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Merci de votre contribution pour mener à bien cette action de Solidarité.
Très cordialement

Jacques FONTAINE

Visitez ce site

Cyber @cteurs : le site d'actions citoyennes

15/02/2009

Rapport sur l’économie du changement climatique www.hm-treasury.gov.uk, et Cambridge University press

Note de lecture

par Michel Griffon

A la demande du gouvernement britannique, Nicolas Stern, ancien chief economist de la Banque mondiale, a publié un rapport dont la presse a beaucoup parlé [1]. Ce n’est pas la première fois que le changement climatique fait la une de la presse, mais cette fois on annonce un chiffrage du coût du changement climatique : 7 500 milliards de dollars. Pour être précis, ce serait le coût de l’inaction. Dès que l’on traduit en coût un problème environnemental, quelle que soit la méthode de calcul, le problème dont il est question acquiert immédiatement une nouvelle crédibilité ; il quitte le domaine des inquiétudes que génèrent de manière répétée les scientifiques pour aller vers celui, plus sensible, du portefeuille. Les gouvernements sont enfin incités à prendre les choses beaucoup plus au sérieux que lors de la négociation du protocole de Kyoto. Cette constatation fataliste amenait d’ailleurs les participants au groupe de travail « biodiversité » de la Conférence pour une gouvernance écologique mondiale des 3 et 4 février à Paris voulue par le Président de la République, à souhaiter que l’on chiffre aussi le coût de l’inaction en matière de biodiversité afin de tenter de stopper ce que l’on appelle maintenant la sixième extinction des espèces dans l’histoire de la planète. Mais l’heure n’est pas à bouder le surcroît de crédibilité qu’apporte Nicolas Stern à l’énorme travail scientifique déjà réalisé par les nombreux chercheurs du Groupe intergouvernemental d’étude du climat (Giec) qui publie simultanément son quatrième rapport pour les décideurs. L’heure est donc à la mobilisation.

Mis à part quelques très rares scientifiques qui trouvent facilement des colonnes dans la presse pour jeter le doute sur les travaux d’une très grande majorité de leurs collègues, l’opinion est maintenant acquise à l’idée que le changement climatique est quasi certain et dangereux car le faisceau des preuves est accablant. Une majorité de gouvernements en est maintenant convaincue. Résistent encore ceux dont les intérêts sont directement liés à l’utilisation du pétrole, ce qui est d’ailleurs peu compréhensible car la rareté du pétrole leur assure pendant des décennies des prix élevés et la possibilité d’investir dans des énergies alternatives, source d’autres profits. Résistent aussi les pays septentrionaux comme la Russie et le Canada qui gagneraient au changement climatique car ils verraient progresser leurs exportations agricoles dans un monde dont l’alimentation serait vulnérabilisée par les sécheresses et les fortes pluies.

Le rapport de Nicolas Stern, en s’appuyant sur des modèles de simulation, évalue le coût de l’inaction qu’il compare au coût d’une action rapide et immédiate. Si l’on ne réagissait pas, les coûts seraient équivalents à la perte d’au moins 5% du Pib mondial chaque année et ceci irréversiblement. Des estimations faisant une place plus grande aux risques chiffrent même les estimations des dommages au montant cataclysmique de 20% du Pib ou plus. En revanche, le coût de l’action à entreprendre pour éviter les pires conséquences du changement climatique peuvent se limiter à environ 1% du Pib mondial chaque année.

Il y a donc urgence à entreprendre des actions. Les investissements qui seraient consentis dans les deux décennies à venir auraient un effet important pour limiter les effets climatiques dans la seconde moitié de ce siècle et du siècle suivant. Ainsi, de manière tangible, notre génération a-t-elle directement la responsabilité d’une grande partie du bien-être des deux générations suivantes. Jamais la définition du développement durable (un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs) n’aura revêtu autant de sens concret : il dépend donc de nous, aujourd’hui, de financer les dépenses nécessaires pour laisser un monde viable à nos propres enfants et petits enfants.

Mais engager une telle action n’est pas simple. Il faut qu’il y ait au sein des sociétés et au sein de la communauté internationale des Etats une vision partagée des objectifs à atteindre et des moyens de les réaliser. Or tous les pays et toutes les catégories sociales ne sont pas égaux face au risque : certaines îles du Pacifique ou des deltas de grands fleuves d’Asie sont déjà menacés dans leur existence même en raison de la montée des eaux ; certaines régions seront plus soumises aux pluies et cyclones que d’autres, ou seront plus sous l’effet des sécheresses que d’autres. De même, tous les pays et catégories de populations ne contribuent pas également à l’émission des gaz à effet de serre, et les coûts nécessaires pour entreprendre les mesures qui s’imposent ne sont pas répartis de manière égale autour du globe.

Face à cette complexité, Nicolas Stern propose quatre clés pour la négociation des cadres internationaux permettant de gérer à temps compté la décroissance des gaz à effet de serre dans l’atmosphère :

-conforter le marché des droits d’émission (rappelons qu’il s’agit de réduire le niveau des droits d’émissions en donnant la possibilité d’acheter et de vendre des droits d’émission) ;

-entreprendre une coopération internationale sur les technologies et les normes ;

-réduire la déforestation, en particulier dans les pays où s’étendent les terres cultivées ;

-adapter les économies et les sociétés les plus pauvres au changement par l’aide publique au développement.

Ce rapport constitue donc un élément moteur important dans la dynamique internationale qui se développe pour lutter efficacement contre l’effet de serre. Une fois de plus, un rapport d’expert alerte la communauté internationale. Pourtant, celle-ci a beaucoup de mal à se structurer, même si elle se trouve face à un danger collectif mondial immense et inédit.

Michel Griffon

10 février 2007

Notes

1 . On trouve aussi ce rapport en cherchant stern review sur un moteur de recherche. Un résumé exécutif est disponible.


Pour citer cette page

Un rapport de Nicolas Stern, « Note de lecture », Ceras - revue Projet n°297, Mars 2007. URL : http://www.ceras-projet.com/index.php?id=633.

14/02/2009

La crise au laser

Entretien avec Jean-Paul Fitoussi : président de l'OFCE et professeur à l'IEP de Paris

Décryptage de la crise et de ses causes. Et analyse des politiques mises en oeuvre pour la combattre.

Quelles sont les causes de la crise actuelle?




Du côté des causes immédiates, la principale est l'emballement du système financier autour de la croyance qu'il était possible d'obtenir des rendements toujours plus élevés. Ce "grand mensonge" a consisté à faire croire à chaque client qu'il lui était possible d'obtenir un gain supérieur au gain moyen. Ce qui est bien sûr impossible. Ce mensonge n'a cependant pas été suffisamment dénoncé: si un syndicaliste avait proposé que chaque salarié gagne davantage que la moyenne des salariés, il n'aurait suscité que des rires...

Pour lire l'article complet télécharger le en cliquant ici.

09/02/2009

Crise : le choc est à venir

8 février 2009

Malgré la débâcle financière et l'urgence climatique, on continue de croire que tout va comme avant. Sans comprendre qu'en réalité nous avons changé d'époque.

Peu de temps avant la banqueroute de Lehman Brothers, Josef Ackermann, le président de la Deutsche Bank, avait laissé courir le bruit que le pire était passé. Dans les semaines fiévreuses qui se sont succédé depuis, les politiques et les spécialistes se sont surpassés dans la recherche de moyens destinés à doper la consommation, comme si le capitalisme était en mouvement perpétuel et qu'il suffisait de relancer son cycle de création continue.

L'idée que, cette fois, il s'agit peut-être de plus que d'une " crise ", n'est apparemment venue à personne. La vie suit son cours : on emprunte, on donne un tour de vis fiscal, et on espère, avec tout ça, passer le cap au plus vite. Le manque de la plus élémentaire clairvoyance de la mesure et des conséquences de la débâcle financière indique pourtant bien que ce qui est arrivé n'a pas été anticipé. Des faillites bancaires massives, des groupes d'assurances entamés, des Etats eux aussi au bord de la ruine ? Et les milliards requis pour tout ça, que sont-ils, sinon de l'argent virtuel injecté dans un système lui-même au bord de l'implosion, à cause, justement, de la nature virtuelle de ses échanges ?

Bien que la catastrophe économique déploie implacablement son cours à une allure défiant toute concurrence, frappant une branche après l'autre, le bricolage, le raboutage et le rembourrage, et les sempiternels sommets continuent à donner l'apparence que la crise est gérée. Les réactions des gens sont graves, mais pas paniquées. En dépit du lot quotidien de nouvelles horrifiques en provenance de la Global Economy, citoyennes et citoyens ne sont que modérément agités.

Notons d'abord qu'un événement, considéré comme historique par la postérité, est rarement perçu comme tel en temps réel. Rétrospectivement on s'étonne qu'un Kafka, le jour où l'Allemagne déclara la guerre à la Russie, ait seulement consigné dans son journal de façon lapidaire : " l'Allemagne a déclaré la guerre à la Russie. - Après-midi : cours de natation ". Les ondes de choc, qui parcourent nos sociétés modernes et complexes, partent d'un point d'impact catastrophique initial qui n'atteint les fonctions essentielles qu'à retardement. Il est donc plutôt exceptionnel qu'un bouleversement social soit reconnu pour ce qu'il est par ses contemporains. C'est aux historiens qu'il appartient d'en constater la réalité. Les écologistes déplorent parfois que les gens ne parviennent pas à intégrer l'idée que leur environnement se modifie.

Une étude menée sur plusieurs générations de professionnels de la pêche, en Californie, a montré que c'étaient les plus jeunes qui avaient le moins conscience du problème de la surpêche et de la disparition des espèces. De telles modifications de perception et de valeurs, analogues aux transformations environnementales, on les rencontre aussi dans la sphère sociale : que l'on pense au renversement complet des valeurs dans la société allemande à l'époque hitlérienne.

Dans cette société, les composantes non juives auraient, en 1933, trouvé complètement impensable que, quelques années plus tard seulement, et avec leur participation active, leurs concitoyens juifs se verraient non seulement spoliés, mais seraient embarqués dans des trains pour être mis à mort. Ce sont pourtant les mêmes qui regarderont, à partir de 1941, les convois de déportés partir vers l'Est, tandis qu'une partie non négligeable d'entre eux rachèteront les installations de cuisine, le mobilier et les oeuvres d'art " aryanisés " ; que certains prendront la gestion d'affaires " juives " ou habiteront des maisons dont leurs propriétaires juifs auront été expulsés. En trouvant cela tout naturel.

Que les changements de cadre de vie ainsi que de normes consensuelles se remarquent à peine, tient aussi à ce que les métamorphoses perceptibles ne concernent qu'une part souvent infime de la réalité vécue. On sous-estime de façon chronique combien le train-train quotidien, les habitudes, le maintien d'institutions, de médias, la continuité de l'approvisionnement entretiennent la croyance qu'en fait rien ne peut arriver : les bus fonctionnent, les avions décollent, les voitures restent coincées dans les embouteillages du week-end, les entreprises décorent leurs bureaux pour Noël. Autant de preuves de normalité qui viennent étayer la conviction bien enracinée que tout continue comme au bon vieux temps.

Au moment où l'histoire se produit, les hommes vivent le présent. Les catastrophes sociales, à la différence des cyclones et des tremblements de terre, ne surviennent pas sans crier gare mais, pour ce qui est de leur perception, représentent un processus quasi insensible, qui ne peut être condensé en un concept comme celui d'" effondrement " ou de " rupture de civilisation ", qu'a posteriori.

C'est bien connu : le savoir croît en même temps que l'ignorance ; mais jusqu'à présent nous avons, avec Karl Popper, donné à cette maxime un sens plutôt optimiste en l'interprétant comme une exigence de stabilité pour les sociétés de savoir. Or les crises qui sont en train de s'accumuler - le climat et l'environnement, l'énergie, les ressources et les finances - manifestent à l'évidence que nous devons nous battre sur de nombreux fronts dans une ignorance abyssale des conséquences de nos actes.

La déconfiture de l'expertise, où qu'elle s'applique, ne marque-t-elle pas que nous nous trouvons déjà à un " tipping point " point de basculement systémique, à partir duquel des tendances ne peuvent plus être corrigées ? La dernière en date nous fait remonter deux décennies en arrière : l'éclatement général que personne n'avait prévu de tout un hémisphère politique avec des effets de fond sur les configurations des Etats. Alors la marche triomphale de l'Occident paraissait scellée ; on proclama précipitamment la fin de l'histoire, mais entre-temps, la suite semble avoir montré que, dans cinquante ans, les historiens pourraient bien dater de 1989 le commencement du recul des démocraties. Ils pourraient bien diagnostiquer que l'actuelle crise financière mondiale seulement n'avait été que la nouvelle étape d'un déclin entamé depuis longtemps.

On peut, sans risque, qualifier dorénavant de changement accéléré le fait de passer en un instant d'une époque à une autre, dès lors qu'un ultralibéralisme débridé succède à un interventionnisme étatique qui met sens dessus dessous toutes les certitudes jusque-là acquises, non seulement en matière d'économie et de finance, mais aussi dans la politique du climat. Pourtant, personne n'envisage sérieusement la possibilité d'un échec total et, à cet égard, les crises financière, énergétique et climatique révèlent des affinités. On tient pour impossible un effondrement complet du système financier et économique et on se représente encore moins que la pénurie d'énergies fossiles atteigne un niveau tel, d'ici quelques années, que même dans les pays les plus riches, les plus bas revenus ne pourront plus se chauffer.

Qu'est-ce que signifie la connaissance du présent ? Les émissions de gaz à effet de serre vont s'accroître du fait de l'industrialisation globalisée, au point que la fameuse limite des deux degrés au-delà desquels les conséquences des changements climatiques deviennent incontrôlables ne sera pas tenable. En même temps, les spécialistes du climat ne nous donnent que sept ans pour changer de cap. La concurrence qui s'accroît de plus en vite autour des ressources pourrait bien dégénérer en affrontements violents pour départager vainqueurs et vaincus.

Et il n'y a aucun moyen de savoir dans quel groupe se situera l'Europe. Désormais, c'est l'avenir des générations futures que l'on va obérer, notamment par l'envol de la dette publique et la surexploitation des matières premières. Cette colonisation de l'avenir se paiera, car le sentiment d'inégalité entre générations est l'un des plus puissants catalyseurs de mutations sociales radicales. Des mutations qui ne doivent pas s'entendre en un sens positif, comme le projet de renouvellement générationnel du national-socialisme l'a montré.

Une masse débordante de problèmes dans un contexte où le manque de solutions possibles est criant conduit à ce que la psychologie sociale définit comme une " dissonance cognitive ". Ou, pour le dire à la manière de Groucho Marx : pourquoi prendrais-je soin de la postérité ? Est-ce que la postérité s'est préoccupée de moi ? Certes, un objectif tel que l'égalité entre générations remet en question les calculs de croissance à courte vue aussi bien que l'idée que le bonheur s'obtient par une mobilité ininterrompue et par l'éclairage 24 heures sur 24 de la planète entière.

C'est justement en temps de crise qu'on voit ce qui se passe, fatalement, quand une entité politique commune ne procède d'aucune idée de ce qu'elle veut vraiment être. Des sociétés qui se contentent de satisfaire leur besoin de sens par la consommation n'ont, au moment où, alors qu'elles se sont coupées de la possibilité d'acquérir une identité du sens et un sentiment de ce qu'est le bonheur quand l'économie fonctionnait encore, plus de filet pour retarder leur chute. Cela tombe au moment où les experts n'ont aucun plan à proposer. Peut-être leur vol à l'aveuglette est-il le signe d'une renaissance. Celle du politique.

Traduit de l'allemand par Nicolas Weill

© Harald Welzer

Crise : le choc est à venir

Harald Welzer

Psychosociologue allemand, chercheur

au Kulturwissenschaftlichen Institut d'Essen

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la mémoire et la perception des événements historiques.L'étude qu'il a dirigée " Opa war kein Nazi " (" Grand-père n'était pas nazi ") a été un best-seller en Allemagne (Fischer, 2002).

" Les Exécuteurs : des hommes normaux aux meurtriers de masse " (Gallimard, 2007)

© Le Monde

07/02/2009

La crise accentue l'intérêt pour le microcrédit


7 février 2009
La Banque mondiale a annoncé la création d'un fonds de soutien à ce mode de financement alternatif


La crise économique va-t-elle renforcer la demande en matière de microcrédit ? Pour le moment, le phénomène n'est pas quantifiable. Mais sur le terrain, d'un bout à l'autre de la planète, les acteurs de la microfinance, qui permet aux plus démunis d'avoir accès au crédit et de démarrer une activité économique, témoignent de l'arrivée à leurs guichets de nouveaux clients, victimes de la crise.

" Depuis quelques semaines, nous avons des demandes de la part de menuisiers, de couturières, de coiffeurs, qui se tournent vers nous parce que leurs banques ne veulent pas ou plus leur prêter ", constate Noureddine Ayouch, président de la fondation Zakoura, l'une des grandes institutions marocaines de microcrédit.

Pancho Otero, directeur de l'Institut des politiques pour la microentreprise de Santa Cruz (Bolivie), confirme que, dans certains pays du continent américain, " très dépendants de l'économie américaine, la hausse du chômage va engendrer une augmentation de l'économie informelle mais aussi une progression de la demande en microcrédit ", bouée de sauvetage pour les exclus.

Selon de nombreux experts, le microcrédit devrait donc jouer un rôle d'amortisseur pour le chômage. Cette fonction n'est pas négligeable alors que, selon le Bureau international du travail (BIT), la crise devrait faire basculer jusqu'à 176 millions de travailleurs dans la pauvreté en 2009. " Le séisme financier actuel a montré comment les banques se sont échappées dans une bulle virtuelle, tandis que le microcrédit est, lui, relié à l'économie réelle ", estime Maria Nowak, présidente, en France, de l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE).

DEMANDE VIGOUREUSE AU NORD

Pour Mme Nowak, qui fut l'une des premières à importer en Europe cette forme de financement née dans les pays en développement, le recours au microcrédit pourrait concerner le Sud et le Nord. " Beaucoup de salariés se retrouvent à la rue du fait des nombreux plans sociaux, le travail indépendant se développe, nous le constatons en France, dit-elle. Le microcrédit permet aux chômeurs d'obtenir un premier revenu, il constitue, en temps de crise, un puissant levier d'insertion professionnelle et sociale. "

La France n'est pas seule à percevoir l'intérêt de la microfinance. Aux Etats-Unis, la secrétaire d'Etat Hillary Clinton compte parmi ses plus fervents soutiens. Et, fait symbolique, le Bangladais Muhammad Yunus, considéré comme le père du microcrédit à travers sa fameuse Grameen Bank, vient d'y implanter ses premières agences.

Sébastien Duquet, directeur général de l'association PlaNet Finance, confirme que le marché va être porté par une demande vigoureuse dans les pays du Nord, notamment en Europe, où, " dans quelques mois, face au chômage, les gens reprendront leur bâton d'entrepreneur ". Mais, estime-t-il, " la crise va aussi se traduire par un inévitable resserrement du crédit et une montée des taux de risques pour les institutions de microfinance, confrontées à la hausse des impayés ou au surendettement ".

Le séisme actuel porte donc en germe des risques de contraction de l'offre. Les économistes se demandent ainsi dans quelle mesure les besoins supplémentaires pourront être satisfaits. Les grands soutiens financiers du microcrédit - banques, fonds d'investissement, donateurs privés et institutions financières internationales - sont fragilisés par la débâcle financière.

En réponse à ces interrogations, la Banque mondiale a annoncé, jeudi 5 février, la création, en coopération avec l'Allemagne, d'un fonds de 500 millions de dollars (390 millions d'euros) qui vise à soutenir les institutions de microfinance. L'Union européenne pourrait, elle aussi, renforcer ses dotations à la microfinance en Europe.

L'enjeu économique commence, de fait, à être bien perçu par les bailleurs internationaux et la classe politique. En 2007, plus de 100 millions de familles auraient bénéficié d'un microprêt. Pour Emmanuel de Lutzel, responsable de la microfinance chez BNP Paribas, il ne faut être " ni euphorique, ni catastrophiste : le secteur va continuer son bonhomme de chemin, comme ce fut le cas en 1997 lors de la crise asiatique ". " Il y a 150 millions d'emprunteurs dans le monde, dit-il, mais 3 milliards de personnes vivant avec moins de 2 dollars par jour ".

Marie-Béatrice Baudet et Anne Michel, avec Marie Delcas à Bogota

© Le Monde


Un secteur en croissance annuelle de 30%

Origine. En 1983, Muhammad Yunus, jeune professeur d'économie, crée la Grameen Bank au Bangladesh. En 1997, la première campagne internationale du microcrédit est lancée. En 2006, M. Yunus et son organisation reçoivent le Prix Nobel de la paix. La Grameen dispose de près de 1 400 succursales et travaille dans plus de 50 000 villages dans le monde.

Marché Selon les études menées par PlaNet Finance, ONG fondée par Jacques Attali, le secteur du microcrédit connaît une croissance annuelle de 30 %. La demande potentielle est évaluée à 263 milliards de dollars (206 milliards d'euros). Près de 70 millions des clients de la microfinance vivent avec moins d'un dollar par jour.


Une initiative de la Municipalité d'AUBIERE

La ville d'AUBIERE jumelée avec la commune de ROLLO, prépare une exposition.

Cliquer sur l'image pour agrandir le document.

04/02/2009

Les universités africaines saturées et démunies

Avec cinq mois de retard, les cours reprennent cette semaine à l'université de Ouagadougou, longtemps paralysée par une grève à rebondissements des enseignants. Les étudiants s'apprêtent à reprendre leurs habitudes : se lever à cinq heures pour décrocher une place pour un cours en amphi qui commence à huit.

En attendant que Ouaga-II, dont la première pierre a été posée en 2008, voie le jour. En attendant aussi que la " politique de double ou triple flux ", envisagée pour absorber des effectifs qui ont encore grimpé en flèche cette année, soit mise en place. " Un professeur donnera deux fois, voire trois si besoin, le même cours au même niveau ", explique le président de l'université, Jean Koulidiati.

Pour lire la totalité de l'article paru dans Le Monde daté du 5 février 2008, cliquer ici pour le télécharger

02/02/2009

Les altermondialistes sont confortés par le succès du Forum social mondial

3 février 2009

Belem (Brésil) Envoyée spéciale
A Belem, au Brésil, 133 000 personnes ont brassé expériences et idées







Le Forum social mondial (FSM) est une expérience de " désordre créateur ". Jamais autant qu'à Belem, il n'aura fallu se raccrocher à cette définition proposée par le philosophe Patrick Viveret pour survivre dans un événement qui a rassemblé, du 27 janvier au 1er février, au-delà de tous les pronostics, 133 000 personnes.

Absence de traduction, désorganisation, heures passées à rejoindre des réunions distantes de plusieurs kilomètres : le parcours du militant a souvent épousé celui du combattant, obligatoirement équipé de bonnes chaussures et d'un parapluie pour se protéger des pluies, diluviennes en cette période de l'année.

Au-delà de ces désagréments, l'édition 2009 confirme que le Forum reste un lieu d'effervescence et de brassage d'idées. Un laboratoire d'expériences et de propositions auquel la crise a redonné du crédit en validant un certain nombre de prophéties altermondialistes. " Nous avons maintenant la responsabilité de mettre des propositions fortes sur la table et de les faire connaître ", admet Jean Merkaert, du Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD).

Parmi ces propositions, figurera la suppression des paradis fiscaux, qui, pour John Christensen, du réseau Tax Justice, " sont le maillon faible d'un système dans lequel ont pu prospérer toutes les dérives de la finance ". La libéralisation des services financiers est aussi pointée du doigt. " Cela a permis aux banques de grossir et elles sont devenues trop grosses pour qu'on les laisse faire faillite. Il faut revenir en arrière et exiger qu'elles financent des activités utiles à la société ", soutient Myriam Vander, du Centre néerlandais de recherche sur les multinationales.

ECONOMIE SOLIDAIRE

" Toutes les crises - alimentaire, énergétique, financière - qui secouent la planète sont liées. Les solutions ne peuvent être construites en imaginant conserver un système qui consomme de façon insoutenable les ressources naturelles ", résume l'économiste péruvien Oscar Ugarteche.

En pleine Amazonie, les peuples indiens, massivement présents à Belem, ont rappelé le lien qui existe entre l'homme et la nature. " Le monde indien est une société de partage et de bien-être, non une société d'accumulation ", souligne Candido Grzybowski, un des fondateurs du Forum.

A Belem, pour que soit préservée l'Amazonie, les organisations écologistes ont réclamé la rupture avec un modèle de développement, qui conduit à la transformation de la forêt en pâturages ou en zones de monoculture intensive de soja. Elles ont plaidé pour une agroforesterie capable d'exploiter les ressources de la forêt sans la détruire. " Cette solution préserve l'environnement et assure la sécurité alimentaire des communautés locales ", défend le Mouvement agro-écologique d'Amérique latine. Des expériences sont déjà en cours, comme dans l'Etat d'Acre, à la frontière bolivienne, où le gouvernement a choisi de valoriser sa " forêt debout ".

A côté de toutes les pistes de réflexion, Belem aura aussi été l'occasion de constater la vitalité de l'économie solidaire sur la plupart des continents. " Des millions de personnes vivent et construisent au quotidien des alternatives pour vivre mieux. Cela est peu visible, mais une autre économie existe déjà ", insiste Ethel Côté, une participante canadienne.

" Même aux Etats-Unis, le mouvement s'amplifie et on va pousser Barack Obama dans cette direction ", explique Julie Matthaei, du Solidarity Network. Pour la première fois dans un Forum social, le drapeau américain n'a pas été brûlé, et il est même question d'organiser la prochaine rencontre, en 2011, aux Etats-Unis.

" Nous offrons une autre perspective sur la crise en montrant qu'il existe des alternatives à un capitalisme en faillite. Et qui peut nier que cela est aujourd'hui nécessaire ? ", a lancé M. Grzybowski en clôturant le Forum. Les participants repartent de Belem en ayant fait le plein d'énergie. Rendez-vous a été pris le 28 mars à Londres, quelques jours avant la réunion du G20, où les altermondialistes espèrent renouer avec les grandes manifestations qui ont fait leur succès.

Laurence Caramel

© Le Monde

3 février 2009 .

Jusqu'à 1 600 euros le mètre carré





Elle s'appelle RuralZed. C'est une maison en kit à très haute performance énergétique, préfabriquée en usine et assemblée en six semaines. Ses concepteurs, les architectes de BedZed, un écoquartier anglais pionnier situé au sud de Londres, devenu, depuis son achèvement, en 2002, une référence en matière d'architecture " verte ", se sont attaqué à la maison individuelle en 2008 pour proposer un modèle facile à construire partout.

On peut juger du résultat sur pièce à Grande-Synthe (Nord), où un prototype de RuralZed a été bâti, en préfiguration d'un futur écoquartier de 400 logements zéro carbone.

Cette maison à ossature en bois, orientée nord-sud, est rendue hermétique, afin d'éviter les pertes d'énergie, par une isolation drastique et une membrane respirante. La température intérieure est régulée par une forte masse thermique absorbant chaleur et fraîcheur, un système de ventilation naturelle à récupération de chaleur et une grande véranda faisant office d'espace tampon.

Eau chaude et électricité sont fournies grâce à l'énergie solaire, mais on peut également ajouter une éolienne, fixée sur le toit... Sur l'année, la consommation électrique hivernale et l'excédent estival, revendu à EDF, sont censés s'équilibrer.

Un jeu d'options permet d'adapter la surface de la maison, d'utiliser des matériaux locaux et d'atteindre, au choix, un des niveaux de performance fixés par le code britannique du logement durable. Mais cela a évidemment un coût : 1 200 euros le m2 pour un niveau 4, 1 600 euros le m2 pour un niveau 6.

G. A.

© Le Monde