Craignant les assimilations faites par l'armée malienne entre rebelles et civils, des Touaregs fuient pour se réfugier dans le pays voisin. Un exilé raconte sa détresse au Pays, de Ouagadougou.
Devenus indésirables dans leur pays, parce que des membres de leur communauté ont pris le maquis contre le régime en place, les Touaregs du Mali se sentent désormais dans l'insécurité chez eux. Bon nombre ont opté pour l'exil vers les pays voisins. Depuis bientôt deux mois, ce sont environ 900 réfugiés touaregs qui sont ainsi arrivés au Burkina Faso, parmi lesquels 300 personnes - hommes, femmes et enfants - sont logées au Stade du 4-Août, à Ouagadougou. Les autres sont restés pour le moment à Djibo, près de la frontière avec le Mali. Selon l'un des réfugiés, Mohamed Alher Ag Abou, il y aurait même parmi eux des Nigériens, mais qui ne se sont pas encore déclarés comme tels. [Le Niger connaît une situation analogue à celle du Mali.]
Depuis quelques jours, ce sont la Commission nationale pour les réfugiés et la Croix-Rouge du Burkina qui s'occupent d'eux. Elles procédent aux modalités devant leur permettre de délivrer à ceux qui le méritent un titre d'asile provisoire leur accordant des droits. A en entendre certains, on dirait que c'est uniquement au Burkina Faso que ces réfugiés se sentent pour le moment en sécurité.
"Nous n'avions aucun problème avec personne, ni avec les citoyens ni avec les autorités. Nous vivions tranquillement dans les pâturages avec nos troupeaux. Mais, depuis 2006, le pays est en crise. C'est ce qui nous a effrayés et nous sommes venus nous réfugier ici, au Burkina Faso, en attendant que la situation se calme au Mali. Nous avons abandonné nos troupeaux pour fuir. Mais nous ne nous inquiétons pas pour nos troupeaux, ce sont nos vies qui nous intéressent. Quand ta vie est en danger, tu ne te préoccupes pas de ta richesse", explique Mohamed Alher Ag Abou.
Le réfugié touareg raconte : "Nous ne sommes pas venus tous ensembles, chacun s'est débrouillé pour arriver ici ; certains ont fait le déplacement en petits groupes de trois, quatre, cinq ; d'autres sont venus avec leurs familles. Les premiers arrivés sont là depuis deux mois, mais des gens continuent toujours de venir. (...) Le Burkina est une terre d'hospitalité et nous nous y sentons en sécurité. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois. Nous étions déjà venus pendant la crise de 1993 et nous étions restés jusqu'en 1997."
"Nous ne pouvons pas dire aujourd'hui qui nous craignons exactement. Nous avons simplement peur des armes et des treillis militaires. Avec la situation qui prévaut au Mali présentement, il nous suffit de voir un homme en treillis pour courir. C'est cela la psychose au sein de notre communauté. Nous comptons rester jusqu'à ce que la paix revienne dans notre pays, sans quoi nous ne bougerons pas d'ici. En tant que citoyens maliens, nous demandons à notre président de faire tout son possible pour que la paix revienne. Qu'il accepte de négocier. C'est son devoir de veiller à la stabilité au Mali. J'ai mal chaque fois que je me vois obligé de fuir et d'aller chez un voisin", lâche Mohamed Alher Ag Abou.
Lassina Fabrice Sanou
Le Pays
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