06/06/2008

Les pays membres de la FAO ne trouvent pas d'accord sur la façon de relancer la production alimentaire mondiale


7 juin 2008

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ALIMENTATION CONFÉRENCE INTERNATIONALE
ROME ENVOYÉE SPÉCIALE

Les Etats membres de la FAO ont bouclé dans la douleur, jeudi 5 juin, le Sommet international sur la sécurité alimentaire. Ils se sont engagés à " réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées pour 2015 au plus tard ". Elles sont plus de 850 millions aujourd'hui, et l'envolée du prix des denrées fragilise la situation de 100 millions d'autres. Mais les pays sont restés évasifs sur deux sujets sensibles : les subventions agricoles et les agrocarburants. Le document final a été jugé " décevant " par de nombreux participants. L'Argentine a regretté que la déclaration ne critique pas les subventions des pays industrialisés.

L'idée qui s'est dégagée de ces trois jours de négociations fait l'unanimité. Il faut doubler la production alimentaire mondiale d'ici à 2050 et mettre l'accent sur le développement de l'agriculture des pays pauvres, surtout en Afrique. Mais les moyens avancés pour résoudre la crise font débat. Le texte encourage notamment " la communauté internationale à poursuivre ses efforts en matière de libéralisation des échanges agricoles en réduisant les obstacles au commerce, et les politiques qui sont à l'origine des distorsions de marché ".

PETITS PAYSANS TENUS À L'ÉCART

Les ONG, ravies que l'agriculture familiale et le principe d'autosuffisance alimentaire redeviennent une priorité, estiment que le commerce et la facilitation des exportations ne sont pas le moyen d'aider les petits producteurs, qui doivent d'abord approvisionner les marchés locaux. Elles reprochent en outre à l'ONU de tenir les petits paysans à l'écart de sa cellule de crise créée pour surmonter l'insécurité alimentaire, alors qu'elle y a inclu les institutions de Bretton Woods (FMI, Banque mondiale et OMC).

L'idée que les investissements privés puissent permettre le développement de l'agriculture des pays pauvres inquiète aussi. Des multinationales avaient été conviées au sommet. " Il faut renforcer la production locale, pas la placer sous le contrôle de l'agrobusiness ", a expliqué Flavio Valente, le secrétaire général de l'Organisation internationale pour le droit humain à l'alimentation (FIAN). " L'heure est venue de voir l'agriculture africaine comme une véritable aubaine commerciale ", a estimé en revanche le président de la Banque africaine de développement, Donald Kabenuka, ravi de voir les fonds d'investissement s'intéresser à son continent.

Cependant, la FAO se dit satisfaite du sommet. " On a pris la vraie mesure du problème de la faim dans le monde (...), du fait que, cette fois-ci, nous n'avons pas seulement un problème humanitaire qui touche quelques pays mais un problème qui touche tous les pays ", a estimé le directeur général de l'organisation, Jacques Diouf. Pour cette agence de l'ONU, contestée pour son manque d'efficacité, l'objectif était d'obtenir une déclaration finale afin que le sommet n'apparaisse pas comme un échec.

" L'important pour la FAO, c'est d'arriver à un consensus sur l'objectif de produire plus ", disait-on dans l'entourage de M. Diouf avant la fin des négociations. Le reste, subventions et agrocarburants en tête, est plus délicat. Les pays ont des intérêts économiques à défendre, faisait-on remarquer pour justifier le blocage des négociations. Le dossier sera de nouveau examiné par le G8, au Japon en juillet.

Laetitia Clavreul

Le Sommet ne tranche pas la question des agrocarburants

Si le réchauffement climatique a été le grand absent du Sommet sur la sécurité alimentaire de la FAO, achevé jeudi 5 juin, les agrocarburants étaient au coeur des différends. La déclaration finale se contente d'estimer qu'ils présentent " des défis et des opportunités ", et d'appeler à des " études approfondies ". Leur production à une échelle industrielle a été défendue avec acharnement par les Etats-Unis et le Brésil.

De quoi décevoir ceux qui réclament un moratoire - au motif que les agrocarburants représentent un danger pour la production alimentaire - et ceux qui pensent qu'il est temps de créer des normes internationales pour éviter les dérives.

Selon le département bioénergie de la FAO, les agrocarburants peuvent être un atout pour le développement des zones rurales à condition d'examiner, pays par pays, le potentiel de terres et d'eau disponibles, de garantir que l'alimentation reste la priorité et de s'assurer que les paysans, et pas seulement les groupes industriels, en profitent. L'idée est que ces combustibles fournissent l'énergie nécessaire à la mécanisation de l'agriculture.

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