23 avril 2011
70 pays ont lancé une initiative pour encourager les investissements dans les énergies renouvelables
Apporter l'électricité à l'Afrique grâce aux énergies renouvelables : c'est l'ambition du partenariat lancé à Paris, jeudi 21 avril, par les représentants de 70 pays, à l'instigation de la France et du Kenya. L'accouchement a été long : cette " initiative Paris-Nairobi " a été mise en chantier en 2009 par l'ex-ministre de l'écologie, Jean-Louis Borloo, et le premier ministre kényan, Raila Odinga. Elle a pour intérêt de lier trois thèmes étonnamment cloisonnés dans les institutions internationales : l'énergie, le développement et le climat.
Malgré l'énorme potentiel hydraulique, solaire et éolien du continent, 70 % des Africains n'ont pas accès à l'électricité. Ce sont les plus pauvres qui paient l'électricité la plus chère, la moins efficace et le plus polluante. Sur la base d'un Livre blanc adopté jeudi, les partenaires veulent briser le " cercle vicieux " qui freine les investissements dans les énergies propres, avec l'objectif de généraliser l'accès à l'électricité d'ici à 2030." C'est le serpent qui se mord la queue, estime la ministre française de l'écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet. On n'a pas de projets parce qu'il n'y a pas de financements et les financements sont refusés faute de projets de qualité. " Un groupe pilote doit travailler, pendant un an, à rendre les projets d'énergie " verte " attrayants pour les investisseurs. Avec une priorité : renforcer les capacités des administrations et définir des modèles de gouvernance politique. " Nous devons mettre en place un cadre réglementaire et législatif qui sécurise la production et les prix, rassure les investisseurs, protège les consommateurs ", liste Elham Ibrahim, commissaire à l'énergie et aux infrastructures de l'Union africaine.
Pour M. Odinga comme pour beaucoup d'Africains, le " manque de capacités " du continent à monter de bons projets est un " prétexte commode " : " La vérité, c'est que les pays riches n'ont jamais rempli leurs engagements en matière d'aide publique au développement, comme ils ne versent pas les sommes promises pour lutter contre le réchauffement ", dénonce le premier ministre du Kenya.
C'est bien là l'un des objectifs de cette initiative : " Mener un lobbying pour que les outils de la lutte contre le changement climatique fassent droit aux besoins énergétiques de l'Afrique ", revendique Mme Kosciusko-Morizet. L'Afrique a reçu à peine 2 % de la manne du mécanisme de développement propre créé par le protocole de Kyoto. Le continent ne veut pas voir lui échapper les fonds promis par les pays du Nord lors de la conférence de Copenhague sur le climat, en 2009 : 30 milliards d'euros d'ici à 2012, puis 100 milliards d'euros annuels pour le fonds vert.
Sceptique Les besoins sont énormes. 1,5 milliard de personnes sur la planète vivent sans électricité. Pour corriger cet état de fait d'ici à 2030, il faudrait investir dès maintenant 40 milliards de dollars (27 milliards d'euros) par an. Où les trouver ? La France défend une taxe sur les transactions financières, le recours au secteur privé, aux banques commerciales. L'Afrique est sceptique, attachée à l'aide publique. " Le bilan de la privatisation du secteur de l'énergie, imposée par les institutions internationales, est plus que mitigé, et c'est de l'argent bon marché dont nous avons besoin ", plaide le ministre de l'énergie du Gabon, Régis Immongault.
Si les énergies renouvelables ne dépassent pas le stade du projet pilote en Afrique, " c'est aussi parce que c'est le continent qui distribue le plus de subventions aux énergies fossiles ", nuance Monique Barbut, présidente du Fonds pour l'environnement mondial. Le défi est d'autant plus grand qu'il s'agit de financer de grandes infrastructures et une myriade de petits projets villageois, dont l'échelle modeste rebute les bailleurs traditionnels. 85 % des Africains sans électricité habitent en zone rurale, et 225 millions d'entre eux vivent avec moins de 1 dollar par jour.
" Le point de départ, ce n'est pas le climat, c'est la pauvreté, explique Pierre Radanne, coauteur du Livre blanc et consultant auprès de nombreux pays africains. Si l'on finance des panneaux solaires sans que cela génère des activités et des revenus, les habitants n'auront pas les moyens de payer les factures, rien ne sera entretenu, et dans dix ans, on repartira de zéro. "
D'où la vraie ambition de cette initiative : faire des énergies renouvelables le levier d'un développement économique local.
Grégoire Allix
© Le Monde
500 millions d'Africains vivent sans électricité Connexion Un milliard et demi d'humains n'ont pas accès à l'électricité, dont 500 millions en Afrique subsaharienne. Le taux d'accès à l'électricité y est d'à peine 30 % (60 % dans les villes et 15 % dans les zones rurales).
Consommation L'Afrique consomme 562 terawattheures d'électricité par an, à peine plus que la France. En moyenne, cela représente 571 kilowattheures (Kwh) par Africain et par an, contre 2 700 Kwh par personne pour la moyenne mondiale, et 7 300 Kwh pour un Français.
Projection Pour généraliser l'accès à l'électricité en Afrique d'ici à 2030, il faudrait, chaque année, desservir 5 millions de foyers supplémentaires et investir au moins 10 milliards de dollars (6,9 milliards d'euros). En 2009, moins d'un dixième de cette somme a été investi dans les énergies propres sur le continent.
Consommation L'Afrique consomme 562 terawattheures d'électricité par an, à peine plus que la France. En moyenne, cela représente 571 kilowattheures (Kwh) par Africain et par an, contre 2 700 Kwh par personne pour la moyenne mondiale, et 7 300 Kwh pour un Français.
Projection Pour généraliser l'accès à l'électricité en Afrique d'ici à 2030, il faudrait, chaque année, desservir 5 millions de foyers supplémentaires et investir au moins 10 milliards de dollars (6,9 milliards d'euros). En 2009, moins d'un dixième de cette somme a été investi dans les énergies propres sur le continent.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire