19 février 2010
Les mauvaises relations entre Alger et Paris ne facilitent pas la libération de Pierre Camatte
Le sort de Pierre Camatte, l'otage français détenu quelque part dans le nord du Mali par la branche maghrébine d'Al-Qaida (AQMI), reste suspendu à des tractations qui, outre Bamako, impliquent Paris et Alger.
Les ravisseurs du Français ont fixé au samedi 20 février la nouvelle date butoir pour trouver un accord conduisant à sa libération, faute de quoi ils menacent de l'exécuter.
Travaillant pour une organisation non gouvernementale (ONG) engagée dans l'aide au développement, M. Camatte, 61 ans, aurait été enlevé, le 26 novembre 2009, par les habitants d'une localité du nord du Mali, des Touaregs, avant d'être remis à un groupe de l'AQMI actif dans la bande sahélienne.
A la mi-janvier, sept semaines après l'enlèvement, le groupe islamiste avait demandé à l'opinion publique française de " faire pression sur le gouvernement Sarkozy pour l'empêcher de commettre la même bêtise que Gordon Brown - le premier ministre britannique - contre ses citoyens ". La phrase faisait référence à l'exécution six mois auparavant par ce même groupe d'un touriste britannique après le refus de Londres de céder au chantage.
Cette fois, outre une rançon, les ravisseurs exigent la libération de quatre islamistes incarcérés au Mali : un Burkinabé, deux Mauritaniens et un Algérien.
Le refus de Bamako
Depuis, l'ultimatum, initialement fixé au 31 janvier, a été repoussé au 20 février sur fond de tractations conduites par des négociateurs maliens qui se trouvent dans le nord du pays.
Les discussions butent sur l'élargissement des " combattants islamistes " détenus au Mali. Bamako refuse de les libérer. " Nous vivons dans un environnement où il y a des règles en matière de sécurité, de lutte contre le terrorisme. Il faut les respecter. C'est ce que fait le Mali en refusant de libérer les terroristes ", faisait valoir, il y a quelques jours, une source malienne anonyme citée par l'Agence France-Presse.
Les propos visaient les autorités françaises, partie prenante dans l'affaire. Bernard Kouchner, le ministre des affaires étrangères, a fait à deux reprises un déplacement éclairs à Bamako au cours desquels il s'est entretenu avec le président malien, Amadou Toumani Touré. Le dernier remonte au samedi 13 février. M. Kouchner était accompagné ce jour-là du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant.
Paris veut que Bamako libère les quatre terroristes en échange de M. Camatte. Mais, à un moment où les relations entre Paris et Alger traversent une crise, la France doit compter avec l'Algérie, pays voisin du Mali et acteur de poids dans la région. L'armée algérienne fournit des véhicules, du carburant et des armes à son homologue malienne.
Or les autorités algériennes refusent de voir libérer celui des quatre islamistes incarcérés qui a la nationalité algérienne. Pour une raison simple : l'homme, selon une source proche du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a été jugé et condamné à mort par contumace par la justice algérienne pour sa participation aux attentats-suicides d'avril 2007 perpétrés au coeur de la capitale algérienne (plusieurs dizaines de morts). Alger a demandé à Bamako son extradition.
" L'Algérie pourrait accepter son placement en résidence surveillée au Mali ", nuance la même source Et d'ajouter : " Encore faudrait-il que le président Sarkozy prenne la peine d'en parler avec M. Bouteflika. Et que M. Kouchner, avant de se rendre à Bamako, passe par Alger. "
Philippe Bernard et Jean-Pierre Tuquoi
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