02/06/2011

Afrique : la ruée vers les agrocarburants


3 juin 2011
LE BLOG DU JOUR " Eco(lo), chroniques pour une économie sociale et durable ", par Audrey Garric


Quelles sont les entreprises qui se ruent sur les terres cultivables africaines afin de produire des agrocarburants ? Le Guardian a mené l'enquête sur cette source d'énergie controversée, accusée de réduire les surfaces consacrées aux cultures, essentiellement dans les pays en développement, et de favoriser la flambée des prix alimentaires pour permettre aux voitures occidentales de fonctionner.
Dans un article publié mercredi 1er juin, il démontre l'importance croissante du phénomène. S'il n'y a pas de recensement officiel des projets, le quotidien assure avoir dénombré pas moins de 100 projets de production dans une vingtaine de pays du continent, émanant de 50 entreprises étrangères.
Dans cette liste des pays investisseurs, à l'affût de la moindre parcelle de terre, le Royaume-Uni tient le haut du pavé. Sur les 3,2 millions d'hectares réservés pour la production d'agrocarburants en Afrique subsaharienne, plus de la moitié sont ainsi liés à onze sociétés britanniques.
" Accès prioritaire à l'eau "
Le champion en la matière est le groupe Crest Global Green Energy, qui détiendrait à lui seul 900 000 hectares au Mali, en Guinée et au Sénégal. Vient ensuite Gem Biofuels, avec quelque 450 000 hectares à Madagascar.
L'Italie se place sur la deuxième marche du podium, avec sept entreprises implantées en Afrique, suivie par l'Allemagne (six), la France (six) et les Etats-Unis (quatre). Le Brésil et la Chine acquièrent aussi des terres en Afrique pour produire des agrocarburants et de la nourriture, même si, dans l'immédiat, l'enquête a mis au jour seulement une poignée de projets concrétisés.
Si certaines de ces entreprises génèrent des profits pour les pays dans lesquels elles sont implantées, grâce aux investissements, à l'emploi et à l'utilisation locale des agrocarburants, la majorité n'entraînent pas de retombées positives locales, estime Lorenzo Cotula, chercheur à l'Institut international pour l'environnement et le développement, qui a analysé des contrats de transactions foncières en Afrique. " Certains de ces contrats ne contiennent que des promesses vagues et inapplicables. D'autres ont des baux de cent ans, pour un loyer très faible et même, parfois, un accès gratuit et prioritaire à l'eau, précise-t-il. Les grandes plantations commerciales chassent par ailleurs les communautés rurales de leurs terres. "
Denrées de base plus chères
Surtout, l'utilisation croissante des terres agricoles afin de produire de l'énergie est de plus en plus contestée dans le monde car elle est accusée de menacer les écosystèmes et d'alimenter la flambée des prix des produits alimentaires, en réduisant les surfaces consacrées à leur culture.
De plus, alors que les agrocarburants, favorisés par la décision de l'Union européenne de pourvoir 10 % de l'énergie nécessaire aux transports par des énergies renouvelables en 2020, sont présentés par leurs partisans comme moins polluants que le pétrole, certains experts contestent leur bilan en matière d'émissions de gaz à effet de serre.
Cette enquête sur la ruée vers les terres africaines coïncide avec un rapport de l'ONG Oxfam prévoyant que le prix des denrées de base va plus que doubler au cours des vingt prochaines années. L'enquête identifie les agrocarburants comme l'une des principales causes et exige que les gouvernements occidentaux mettent fin à leurs politiques en la matière.
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" Eco(lo) "
© Le Monde

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