21/02/2012

L'argent des migrants est trop cher à rapatrier



22 février 2012

Les émigrés des pays du Sud envoient chez eux 300 milliards de dollars chaque année

Par La Poste, les banques, Western Union ou grâce à des porteurs obligeants, l'argent des travailleurs migrants dans les pays riches regagne les pays du Sud. L'OCDE estime que 300 milliards de dollars (227 milliards d'euros) sont transférés chaque année, soit plus de deux fois l'aide au développement. Pour un pays comme le Maroc qui a reçu 7 milliards de dollars en 2008, cela représente 8 % de son PIB. On estime que l'Afrique perçoit des expatriés quelque 30 milliards d'euros. Mais transférer ces sommes au bled ou au fond de la brousse coûte cher : de l'ordre de 10 % au plan mondial et 15 % en Afrique. Aussi le G20 de Cannes, en novembre 2011, avait-il demandé que ces frais soient réduits de moitié d'ici à 2014.
Cinq propositions
La Banque africaine de développement (BAD) et l'Agence française de développement (AFD) ont conduit une étude sur les transferts vers les pays du Maghreb et les quatorze de la zone Franc. Leurs propositions devaient être débattues mardi lors d'un séminaire à Paris.
" Nous avons calculé qu'une économie de moitié des frais dépasserait les deux milliards d'euros, explique Patrick Giraud, économiste en chef à la BAD. Nous avons proposé cinq améliorations afin de faire jouer la concurrence entre les sociétés de transfert d'argent et faire contribuer cet argent au développement local. "
Première proposition : que les pays récepteurs suppriment les clauses d'exclusivité avec les sociétés de transfert, comme l'ont fait le Sénégal et le Maroc, et que les fragiles sociétés de micro-finance, essentielles pour atteindre les villages perdus, soient épaulées par les autorités financières.
Deuxièmement, favoriser la " bibancarisation ", de telle sorte que les banques soient implantées dans les pays émetteurs et récepteurs ou qu'elles passent des accords avec leurs consoeurs locales. Ce qui veut dire l'ouverture de comptes pour les non-résidents.
Troisièmement, pour faciliter la réalisation de projets individuels dans le pays d'accueil, des accords interbancaires sont indispensables, par exemple pour permettre qu'une épargne constituée auprès d'un établissement français puisse être utilisée pour obtenir un prêt immobilier au Mali.
Quatrièmement, se servir du téléphone mobile et de l'e-banking pour acheminer électroniquement des sommes d'argent, comme cela se fait au Kenya. Le séminaire étudiera le projet de plateforme monétique dans les pays de l'Union économique et monétaire de l'Ouest africain.
Cinquièmement, adopter des normes boursières comparables entre la France et les pays africains pour offrir aux migrants épargnants des produits financiers sûrs capables d'accueillir leurs investissements sur les places africaines ou maghrébines.
Alain Faujas
© Le Monde

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